Final Fantasy : Douce musique à nos oreillesSinging Frames

FINAL FANTASY : DOUCE MUSIQUE À NOS OREILLES
Si la qualité des jeux Final Fantasy est de plus en plus pointée du doigt au fil des opus, celle de sa musique demeure intouchable et tout bonnement inattaquable.
Tatatatam Tata Tatatam ! Ce thème, vous le connaissez. Vous l’avez même tellement entendu qu’on prend le pari que vous l’avez chanté en le lisant. Vous l’avez, il s’agit bien entendu de la fameuse « Victory Fanfare », le jingle de victoire systématiquement repris dans chaque opus de Final Fantasy depuis 1987. L’aura de cette mélodie est telle qu’à l’instar des thèmes de Super Mario Bros et The Legend of Zelda, même ceux qui n’ont jamais joué à un jeu FF de leur vie sont capables de la reconnaître.
Tout ça pour dire qu’à elle seule, cette séquence de neuf notes témoigne de la magie sonore qui façonne la légendaire saga de JRPG créée par Hironobu Sakaguchi et éditée par Square Enix depuis près de quatre décennies. Une prouesse et un savoir-faire que l’on doit à une poignée de compositeurs de renom, mais avant tout à la sensibilité d’un seul homme : Monsieur Nobuo Uematsu.
LES MUSICIENS DE LA LUMIÈRE
Architecte sonore du premier opus de 1987 jusqu’à Final Fantasy XI en 2002, Nobuo Uematsu a effectivement porté sur ses épaules l’habillage musical de quasiment tous les jeux de la franchise FF (spin-off compris) pendant plus de quinze ans.
Pour quiconque souhaiterait à tout prix le mettre dans une case, il serait à ranger dans la catégorie des compositeurs de l’école classique/néoclassique. Ceci dit, sur le plan purement stylistique, le Japonais a tout de suite cherché à donner à ses compositions un petit truc en plus qu’il a puisé chez les grands compositeurs de l’époque romantique. D’ailleurs, le musicien n’a jamais caché s’inspirer le plus souvent de son ressenti personnel et de ses propres émotions, lui qui admet également parfois être influencé par les lieux où il compose. Son goût pour la musique populaire le pousse également à exploiter des compositions allant du folk jusqu’au metal (il est lui-même d’ailleurs membre de plusieurs groupes de power metal, The Black Mages et The Earthbound Papas), en passant par la musique traditionnelle voire véritablement électronique et new age.

Nobuo Uematsu, le père des musiques de Final Fantasy
Mais qu’importe le genre musical qu’il touche, ce qui prime pour lui, c’est donc l’émotion brute apportée par la mélodie plus que la richesse et la succession de couches musicales. Une vision qui lui a parfois valu quelques critiques, certains qualifiant ses compos de simplistes, voire basiques. Un argumentaire appuyé par le fait qu’Uematsu a d’abord composé sur des machines techniquement limitées, la NES et la SNES en tête. L’arrivée de la PlayStation et du support CD sur le marché des consoles lui a ensuite permis de faire fi de toutes ces contraintes et d’exprimer toute l’étendue de son talent sans aucun compromis.
C’est ainsi, en couplant sa sensibilité personnelle à son expertise mélodique, qu’Uematsu est parvenu à donner à Final Fantasy des thèmes et des leitmotivs plus marquants les uns que les autres. Entre les thèmes de personnages poignants, les musiques de combats tantôt épiques, tantôt extravagantes, et les mélodies propres aux environnements qui nous transportent instantanément dans ces mondes pourtant fictifs, le répertoire du génie nippon est aussi riche que magnifique, et surtout distributeur d’émotions intenses pour de nombreux joueurs.
Le grand maître Nobuo Uematsu continuera d’officier en tant que compositeur en chef de la musique des Final Fantasy jusqu’à sa démission de chez Square Enix en novembre 2004. Quand bien même il a signé et signe encore ponctuellement quelques morceaux pour les jeux de la saga, c’est plus ou moins à cette période que les fans considèrent que Final Fantasy est entrée dans ce qu’ils appellent « l’ère du déclin« . Une période durant laquelle la magie de la formule FF s’est quelque peu essoufflée, la faute entre autres à des histoires moins audacieuses, des personnages moins bien écrits et quelques égarements de gameplay par ci par là. Encore aujourd’hui, la saga continue de se chercher, mais rassurez-vous, ses OST, elles, n’ont rien perdu de leur superbe.
Tout simplement parce qu’après qu’Uematsu a quitté le navire, la relève a été assurée par plusieurs compositeurs différents, mais tout aussi talentueux. Des Avengers de la musique, ou dans le cas présent, des Guerriers de la Lumière qui se sont chargés de tenir la barre. Là, tout de suite, on pense notamment à Masashi Hamauzu pour son travail sur Final Fantasy X, Final Fantasy XIII et la trilogie Final Fantasy VII Remake (aux côtés de Mitsuto Suzuki), à Naoshi Mizuta et Kumi Tanioka sur Final Fantasy XI, à Hitoshi Sakimoto et ses œuvres sur Final Fantasy XII, aux élans rock de Takeharu Ishimoto dans divers spin-off de la série ou encore à la virtuosité d’une Yoko Shimomura dont les skills au violon et au piano ont magnifiquement habillé l’épisode Versus XIII et accompagné le voyage épique de Final Fantasy XV.
La dernière figure majeure à avoir rejoint l’armada musicale de l’éternelle ultime fantaisie de Square Enix n’est autre que Masayoshi Soken, dont la pâte dark fantasy mêlant musiques oppressantes et grandiloquentes ont façonné l’habillage sonore du MMO Final Fantasy XIV et de ses nombreuses extensions, ainsi que celui du dernier FF numéroté en date, Final Fantasy XVI.
Clairement, Square Enix peut remercier ses musiciens de génie pour les travaux. Tout simplement car c’est à eux que l’éditeur doit les fondations d’un véritable empire musical dont le prestige est sans égal dans le champ du JRPG et même du jeu vidéo.
LIMIT BREAK MÉLODIQUE
Prenez ce chiffre pour vous faire une idée : D’après Discogs, le site de recensement de référence du patrimoine musical mondial, Square Enix Music, la branche musicale et maison de disque de l’éditeur japonais donc, rassemble un total de 317 projets, dont pas moins de 202 sont relatifs à la licence FF. Dans le lot, on trouve des OST originales, des vinyles, des best of, des projets lives, des compilations de remix et d’arrangements divers allant de l’acoustique au métal, en passant par la folk, la lo-fi et le jazz. En somme, il y en a vraiment pour tous les goûts.
« Pour vous détendre pendant vos jours de congés, pour réviser ou vous accompagner pendant vos heures de travail, nous vous invitons à apprécier et à vous plonger dans la musique de ces jeux cultes. Ceux qui vous ont laissé des souvenirs inoubliables, mais aussi ceux que vous n’avez encore jamais faits et qui vous ont toujours fait de l’œil. » Ce discours d’intention est issu de la description officielle du label sur les différentes plateformes musicales et témoigne de la confiance de la marque en ses musiques.

Le logo officiel du label Square Enix Music
Comment leur donner tort quand on constate qu’à l’heure où nous écrivons ces lignes, Square Enix Music cumule près de 1,2 million d’auditeurs mensuels rien que sur Spotify ? Ajoutez à ces chiffres ceux des autres plateformes de streaming ainsi que les millions de vues/écoutes cumulées sur la chaîne YouTube officielle du label, et vous comprendrez pourquoi les musiques de l’éditeur, et tout particulièrement celles de Final Fantasy, ont largement leur place au Panthéon des OST les plus cultes de l’histoire du jeu vidéo.
Et c’est justement parce que celles-ci sont si populaires auprès des joueurs que le studio a décidé de les mettre en valeur. D’abord avec les jeux vidéo Theatrhythm Final Fantasy. On parle ici d’une série de jeux de rythme dans laquelle on joue avec les nombreux thèmes musicaux de la licence du premier jeu de 1987 jusqu’à FFXVI, en passant bien sûr par Final Fantasy VII Remake et les nombreux spin-off de la saga. Pour que vous vous rendiez compte de l’ampleur du phénomène, apprenez que Final Bar Line, le dernier volet en date sorti en 2023, nous offre pas moins de 385 morceaux dans son bundle de base. Un chiffre qui peut monter jusqu’à 505, en comptant tous les packs de contenu additionnel achetables in game. Vous l’aurez compris, c’est un must have pour les fans, un véritable buffet musical pour quiconque vibre aux mélodies de Final Fantasy.
Proposer un musée sonore ludique à la gloire de sa licence phare, c’est déjà grandiose. Mais au-delà du JV, quel meilleur moyen pour promouvoir son patrimoine musical que de le faire résonner dans les plus grandes salles de concert du monde ? C’est dans cette optique que depuis 2007 (soit bien avant que les concerts de musiques de jeux vidéo ne deviennent monnaie courante), Square Enix a créé l’événement Distant Worlds: Music from Final Fantasy. Derrière ce nom aux sonorités presque mystiques se cache en fait une tournée mondiale de concerts dirigée par le compositeur et chef d’orchestre américain récompensé aux Grammy Awards, Arnie Roth.
Sur scène, il accompagne un orchestre philharmonique dans l’interprétation de réarrangements symphoniques des morceaux les plus mémorables de la série. Cerise sur le gâteau, ces concerts sont souvent, voire systématiquement agrémentés de guests prestigieux. D’un côté, les interprètes originaux de certains thèmes chantés iconiques de la saga, de l’autre, les compositeurs des OST qui font le déplacement en personne. Pour le plus grand plaisir des fans.
Non content de représenter un vrai moment de communion et d’émotion pour les fans, ces concerts ont aussi donné naissance à plusieurs albums : à ce jour, sept disques officiels numérotés Distant Worlds sont sortis. Ces derniers reprennent en fait les meilleures performances live de la troupe depuis 2007. D’autres projets dérivés hors-série ou plus thématiques sont également disponibles, à l’instar des albums Returning Home et Coral, ce dernier célébrant les 35 ans de la franchise.
Le phénomène est tel qu’en France, Distant Worlds a aussi fait des émules. En effet, de plus en plus de troupes professionnelles françaises passionnées produisent à leur tour leur propre concert hommage à la saga d’Hironobu Sakaguchi. S’il fallait vous en conseiller quelques-uns, on partirait les yeux fermés sur L’Écho de l’Ultime Fantasy du groupe de rock mélodique toulousain Neko Light Orchestra et sur le tribute au piano Crystalline Resonance. Deux salles, deux ambiances comme on dit, mais soyez sûrs que la puissance émotionnelle et musicale de ces deux shows made in France saura vous embarquer à coup sûr dans un voyage musical inoubliable.
Plus largement, les musiques de Final Fantasy ont dès leurs premières notes imposé un standard de qualité élevé dans le spectre des OST de JRPG et de jeux vidéo en général. Le piano mélancolique de « To Zanarkand » (FFX), l’iconique et chaotique thème de Sephiroth « One Winged Angel » (FFVII), l’opéra grandiose de Final Fantasy VI, le sublime « Melodies of Life » de FFIX, le magnifique « Nascent Requiem » de FFXIII, ou encore les incontournables thèmes du Prélude ou des Chocobos repris dans chacun des épisodes de la franchise devraient suffire à vous convaincre. Il y en a d’autres bien sûr, beaucoup d’autres qui mériteraient votre écoute, mais si ces quelques morceaux déjà ne suffisent pas à vous toucher en plein cœur, pas même la lame d’un Tomberry ne saura transpercer le cristal froid de votre organe nimbé de ténèbres.



