Dans une autre vie, avant sa fusion avec Chunsoft, Spike était à l’origine des séries Budokai Tenkaichi et Raging Blast pour le manga Dragon Ball Z, avec plus ou moins de succès selon les épisodes. Depuis la formation de la nouvelle entité, Spike Chunsoft a créé le sympathique mais très oubliable J-Stars Victory VS+. Si ce pédigrée vous fait peur, vous avez raison de vous méfier puisque la plupart des critiques concernant la sortie de l’an dernier restent valables. Cette fois-ci, le jeu de combat 3D se concentre sur l’univers One Piece déjà bien représenté dans la production précédente. On troque cependant les affrontements à quatre sur la carte contre du Tag Team à 3 contre 3 qui rend l’action un peu plus claire puisque l’on ne risque plus de se prendre dans le dos le second ennemi.
Vaisseau de pirates sanguins
Comme son grand frère, Burning Blood mise tout sur le spectacle au détriment du gameplay. Le jeu semble toujours lent. Il met beaucoup de temps à se mettre en place avec la sélection des trois personnages et des trois soutiens (multipliez le temps par deux si vous jouez à deux en local puisqu’on ne peut pas sélectionner son équipe en même temps que l’autre). Si l’utilisation d’équipes déjà enregistrées peut aider ici, on en vient rapidement à faire aléatoire pour aller plus vite, ce qui est au moins bon pour découvrir le casting. Une fois cette étape passée, il faut attendre le chargement, valider la fin du chargement et passer les dialogues des six combattants pour se lancer enfin dans un combat qui est plus que mou et sans arrêt interrompu par des animations et autres cinématiques. Lourdeur ultime, une fois l’affrontement terminé, il faut également confirmer son choix pour revenir au menu et lancer une autre partie. Pourtant, en soi, le gameplay n’est pas très compliqué. Un bouton pour les attaques normales, un pour les attaques uniques du personnage (avec dans les deux cas, la possibilité de maintenir le stick vers le bas pour une variante), le saut et la garde.La troisième arme se situe sur le bouton L1 qui, quand il est maintenu, permet de changer l’effet des autres boutons à l’exception de la garde pour utiliser des techniques spéciales qui représentent les réelles différences entre les personnages.
Le jeu parvient brillamment à utiliser les spécificités de l’univers.
On a là la formule la plus basique du genre qui ajoute ensuite des gimmicks pour ajouter de la vie à tout cela. Le plus gros d’entre eux est le système de Tag qui permet d’échanger son combattant en plein combat. Très classique, il se rend plus utile à l’aide de la jauge d’Embrasement. Cette jauge divisée en quatre parties permet, en échange de deux morceaux, de renforcer une attaque unique en cours en invoquant un coéquipier pour effectuer une Attaque unie ou, au contraire, d’interrompre un combo de la même façon dans une Défense unie. Si la victime a également deux barres à dépenser, elle peut alors prendre le dessus avec une Anti-union. Si elle est remplie, la jauge permet de lancer un Embrasement qui est un mode plus puissant à la durée limitée. En appuyant une seconde fois sur R3, c’est un Coup suprême qui se lance. Les personnages ont une autre jauge, qui est liée à leur particularité. Dans le monde de One Piece, les personnes qui possèdent le pouvoir d’un Fruit du Démon de type Logia sont virtuellement invulnérables puisqu’elles sont composées d’un élément qui se recrée à l’infini comme le feu, la glace ou le sable. Faire un jeu de combat avec ce pouvoir peut donc être décevant puisqu’il faut donc oublier ce talent spécial. L’auteur du manga a cependant également introduit le Haki qui permet de contrer cet état. Le jeu parvient brillamment à utiliser ces spécificités de l’univers avec la touche R1 qui puise dans la jauge pour rendre les uns invincibles tandis que les autres peuvent de la même manière leurs remettre les pieds sur terre.
On s’ennuie très rapidement d’autant plus que le plaisir est souvent gâché par la caméra située dans le dos qui gêne très souvent la visibilité.
Pour finir, le jeu contient aussi des soutiens qui n’interviennent pas physiquement pendant le combat mais améliorent les caractéristiques des combattants avec parfois la nécessité d’appuyer sur la croix directionnelle s’il y a besoin de les activer soi-même. L’ensemble semble être un jeu très simple à qui on a ajouté des mécaniques pour coller à l’œuvre d’origine sans penser à la cohésion du gameplay. Le résultat est lourd et ce même si le sentiment du respect le plus fidèle est présent pour chaque personnage. On s’ennuie très rapidement d’autant plus que le plaisir est souvent gâché par la caméra située dans le dos qui gêne très souvent la visibilité. Il faut régulièrement deviner ce que l’adversaire fait et sa distance puisque notre propre personnage bloque la caméra. En multijoueur, Burning Blood tente dans un premier temps d’éviter l’écran partagé ce qui rend souvent impossible la tâche du second joueur. Cependant le Split Screen, proposé en option, n’aide pas vraiment non plus la visibilité. C’est d’autant plus dommage car les combats en 9 contre 9 sont réservés au local (en utilisant en réalité 3 trios avec des pauses quand un trio complet est K.O.). Bien évidemment, le multi en ligne est également possible avec deux formes très classiques : les matches amicaux et les matches pour le classement. Le online marche sans transcender par ses options ou son interface, il s’agit du minimum syndical ce qui est également le mot d’ordre pour le reste des modes.
Marineford, Marineford, Marineford
Cela risque de vous étonner mais la première partie que vous venez de lire est un spoil. Quand on lance pour la première fois le jeu, seul le mode histoire nommé Guerre au sommet est disponible. Ce n’est qu’à la fin du premier chapitre que les autres modes tels que les matches simples contre l’IA ou un humain, le online ou même l’entraînement se débloquent. Cette Guerre au sommet est d’ailleurs la plus grosse calamité du jeu. Si l’effort de proposer un mode histoire est louable, la majorité de ses choix dépassent l’entendement. Composé de quatre chapitres, il fait revivre quatre fois l’arc Marineford en prenant un personnage central différent. Compléter ce mode demande donc de réussir une cinquantaine de combat en revoyant en boucle les mêmes cinématiques et bien sûr, chaque niveau a lieu sur ce qui semble être le même terrain. La stupidité va même jusqu’à ne jamais réellement faire de matches en équipe ce qui oblige à réapprendre à jouer plus tard pour intégrer cette notion pourtant centrale du gameplay. De plus, One Piece narre les aventures des Chapeaux de Paille, l’équipage d’un bateau, alors que l’arc Marineford est justement celui où huit des neuf membres ont disparu. On peut donc faire à 100% la campagne de ce jeu qui dure entre 5 et 8 heures sans jamais apprendre l’existence de Zoro, Nami ou Chopper comme si un jeu Dragon Ball Z pouvait oublier Vegeta ou Piccolo (ils sont tout de même jouables). On a donc plus l’impression de faire les mêmes combats en boucle, malgré quelques conditions spéciales qui viennent parfois pimenter le tout, et pour rien puisqu’on y débloque qu’une petite dizaine de personnages sur les 42 jouables et 4 soutiens sur les 65 présents.
Le joueur n’est pas vraiment récompensé et cela tient surtout sur sa bonne volonté.
Heureusement, le mode Versus PRIME vient relever le niveau en proposant environ 250 missions réparties en plusieurs catégories. Outre les combats génériques qui forment le gros du contenu, le jeu contient aussi des missions d’entraînement qui sont parfaites pour vérifier ses acquis avant de se lancer dans des défis plus durs mais aussi des missions spéciales (une par personnage jouable) pour tenter d’essayer tout le monde au moins une fois. Là non plus, le joueur n’est pas vraiment récompensé et cela tient surtout sur sa bonne volonté mais c’est au moins varié. Le troisième mode présent est la Capture de Drapeau ce qui peut sembler bizarre dans un jeu de combat. Rien à voir avec le mode de jeu habituel puisqu’il s’agit d’un mode en ligne collaboratif. Il faut en effet choisir une équipe et parcourir la carte du monde pour attaquer ou défendre des bases. Les déplacements et les combats coûtent de l’énergie que seul le temps pourra restaurer, à l’image d’un Free-to-Play. Les attaques comme les défenses sont en fait des affrontements contre d’autres joueurs ou des IA dont l’issue attribue des points à l’équipe représentée par le gagnant, points qui pourront aider à conserver la base ou au contraire la récupérer pour son équipe. Si le principe est très sympathique, les limites semblent évidentes dans les faits : les équipes ne sont pas équilibrées. Il faut en effet choisir entre différents équipages de l’univers et la grande majorité des joueurs choisissent celui des héros dont on nous indique souvent à l’avance qu’il est le plus peuplé ce qui assure en permanence leur victoire et tue l’intérêt entier du mode.
Une bonne volonté qui n’empêche pas certaines combinaisons d’être invulnérables et d’autres trop limitées pour être utilisées malgré l’équilibre des compteurs.
L’équilibrage n’est d’ailleurs pas qu’un problème de ce mode puisqu’il est présent partout, ou plutôt absent. Beaucoup de combos semblent infinis, tout comme certains boucliers. Quelques personnages sont capables de faire de gros dégâts à l’autre bout de la carte sur des zones qui rendent l’approche impossible. L’équipe consciente du problème a donc mis en place un système de points qui limite la composition des équipes. Ainsi, il est parfois demandé de se limiter à 9000 points quand un personnage coûte entre 2000 et 3000 points et un support entre 500 et 1000. Une bonne volonté qui n’empêche pas certaines combinaisons d’être invulnérables et d’autres trop limitées pour être utilisées malgré l’équilibre des compteurs. Le constat est encore pire avec l’expérience. Chaque combat fait gagner un certain nombre de points d’expérience aux trois vainqueurs tandis que le reste du roster récupère également 10% de la somme. La différence de niveau fait donc d’autant plus mal quand elle s’ajoute au problème d’équilibrage. Spike Chunsoft a en revanche fait un bel effort sur les conversations pré-combat dont le nombre semble infini pour le plus grand bonheur des fans. On regrette tout de même que seuls les arcs Marineford et Dressrosa ait eu l’attention de l’équipe avec seulement un personnage jouable qui ne vient d’aucune des deux périodes. Pareil pour les terrains, au nombre de 12, dont deux génériques et cinq pour les deux arcs cités précédemment. Graphiquement, le jeu impressionnera plus pour ses animations, ses effets et sa gestion des dégâts (les vêtements s’abîment pendant le combat) que pour son moteur qui heureusement ne connaît pas de problème majeur de framerate ce qui aurait été un comble pour une production qui vise simplement les 30 images par seconde. Pour finir, les musiques génériques sont de retour et font le travail en l’absence de la bande originale de l’animé et, au moins, les voix japonaises sont là.
Butin de guerre
Que l’Invader orange en tête d’article ne vous y trompe pas, One Piece: Burning Blood n’est pas une catastrophe. Il est seulement moyen de façon très énervante. Adressé pratiquement de manière exclusive aux amateurs du travail d’Eiichiro Oda (qui sont à jour), il fait partie de ces jeux qui mettent un peu mal à l’aise car le potentiel se fait véritablement ressentir. Ainsi, on aimerait voir débarquer une suite qui corrige les défauts. Cependant pour que le jeu connaisse une autre itération, il faudra que celui-là se vende correctement ce qui signifie acheter un jeu qui ne vaut clairement pas son prix dans l’espoir qu’assez de gens fassent de même pour continuer la série. Mais pas assez pour que l’éditeur et le développeur ne décident de s’enfermer dans leurs erreurs. Au final, il reste un Burning Blood en mode pilotage automatique, mou malgré quelques bonnes idées pour adapter certains concepts du manga et sur lequel on se voit mal passer plus de 20 heures. Trop opaque pour les néophytes du manga (pour eux, on conseille plutôt One Piece Pirate Warriors 3), il pourrait seulement servir à savoir qui est le plus fort entre deux personnages si son interface et son équilibrage donnaient envie d’enchaîner les parties.
L'avis général
- Très simple à prendre en main...
- Un solo conséquent...
- Un casting impressionnant pour un premier essai
- Une bonne adaptation des capacités des personnages
- Spectaculaire
- ... trop pour être amusant
- ... avec des choix incompréhensibles
- Trop centré sur deux arcs en particulier
- Exact opposé de la notion d'équilibrage
- Souvent illisible