Dix-huit mois après la sortie du prologue Ground Zeroes, Hideo Kojima nous livre enfin Metal Gear Solid V : The Phantom Pain, et cette fois-ci c’est du sûr : ce sera bel et bien le dernier MGS chapeauté par le maître (pour l’instant). Le bonhomme nous a déjà fait le coup plusieurs fois, mais ses relations avec l’éditeur Konami se sont grandement détériorées durant le développement du jeu. À tel point que le game designer s’est retrouvé muselé, avec un accès restreint aux ressources de Konami avant qu’il ne quitte définitivement la société. Ambiance.
Le réveil du serpent
Bien que l’on connaisse déjà les tenants et les aboutissants de la saga, ce cinquième épisode canonique n’en est pas moins crucial puisqu’il complète l’histoire de Big Boss, le Snake original, et se situe en plein milieu de la timeline Metal Gear. Il est donc difficile pour les joueurs ne connaissant pas la saga d’apprécier complètement The Phantom Pain. Quant aux fans de la série, ils connaissent déjà l’issue de cet opus mais veulent plus de précisions sur les motivations de Big Boss. Hideo Kojima se devait donc de conclure en beauté.Faisons un petit rappel de la situation. Passé de bon soldat à légende vivante des champs de bataille, Big Boss devient le leader d’une armée indépendante : Militaires Sans Frontières. Suite aux évènements de Peace Walker et Ground Zeroes, la Mother Base, base offshore de MSF, est détruite et Big Boss est dans le coma. Il se réveille en 1984, neuf ans plus tard, point de départ de The Phantom Pain. Comme d’habitude, le jeu s’inscrit dans des évènements historiques et offre en plus quelques éléments de science-fiction (boss avec des pouvoirs, technologie évoluée). Auparavant guidé par les causes qu’il considère justes, il se lance désormais dans une quête de vengeance sous l’impulsion de son bras droit, Kazuhira Miller alias Kaz. Mais The Phantom Pain est fidèle à la saga et aborde d’autres sujets très sérieux sans aucune censure : la politique, la torture, le contrôle des ressources naturelles, les enfants soldats, le développement du nucléaire.The Phantom Pain aborde des sujets très sérieux sans aucune censure.
La douleur fantôme
La situation délicate de Kojima chez Konami semble transparaître dans MGS V. Réduit au silence par l’éditeur, le game designer semble avoir infligé le même traitement à Big Boss. Kojima Productions est démantelé par Konami, la Mother Base est détruite. Kojima n’a pas le droit de s’exprimer sur son jeu, Big Boss est dans le coma. Kojima est impuissant face au géant Konami, Big Boss se réveille et doit fuir. Kojima est le véritable magicien mais il doit se soumettre à Konami, tout comme Big Boss se soumet aux ordres de Kaz. Le héros se remet tant bien que mal grâce à l’aide d’Ocelot, aussi fidèle que les fans de Kojima.La narration est moins cinématographique et plus distillée qu’auparavant.
Bref, Big Boss a changé, sa voix également puisque c’est maintenant Kiefer Sutherland qui exécute (avec brio) le doublage jusqu’ici assuré par David Hayter. La narration subit donc logiquement une mutation : moins cinématographique et plus distillée qu’auparavant. Les détails importants de l’histoire sont ainsi souvent cachés dans des briefings et écoutes sur cassettes audio qu’il faudra écouter patiemment.
La mue du serpent
Les survivants des MSF se nomment maintenant les Diamond Dogs. Big Boss doit développer une nouvelle Mother Base, poursuivant la formule de Peace Walker avec une gestion encore plus approfondie. Il faudra pour cela récupérer des ressources sur le terrain et recruter des soldats grâce au ballon Fulton. Affecter les bonnes ressources aux projets de la Mother Base permettra à Big Boss de bénéficier d’armes plus pointues et d’améliorations pour sa prothèse de bras.Le découpage en missions principales et secondaires s’inscrit également dans la continuité de Peace Walker, à ceci près que Big Boss est maintenant déployé sur une grande zone ouverte dans laquelle sont réparties les missions. La saga évolue également sur un autre point : le Buddy system. Il est possible de choisir son équipement et son partenaire avant chaque déploiement, conditionnant ainsi votre stratégie sur le terrain. Au départ, seul le cheval pourra accompagner Big Boss. Mais d’autres compagnons seront débloqués au fil de l’aventure dont la fameuse Quiet que l’on a aperçu dans de nombreuses images avant la sortie du jeu. L’iDroid, vu dans Ground Zeroes, permet de demander un appui aérien, un largage d’armes et de munitions, ou un changement de compagnon. Le soft propose un contenu gargantuesque, à tel point que les missions secondaires et le développement de la Mother Base peuvent parfois nous détourner de l’histoire principale. Il ne faut pas oublier qu’une histoire racontée de façon plus linéaire offre un rythme potentiellement mieux maîtrisé et donc un jeu plus passionnant. Toutefois, même si les objectifs des missions ne sont pas très variés (exfiltrer un otage, neutraliser des cibles, récupérer des objets), le monde ouvert et les mécaniques de jeu sont jouissives et aident à passer l’éponge.The Phantom Pain propose un contenu gargantuesque.
En effet, Big Boss se dote d’une palette de mouvements étoffée et fluide. On manipule le personnage avec aisance, que ce soit durant les phases d’infiltration ou pendant les phases d’action. L’interaction avec le décor permet de se faufiler discrètement en se collant contre un mur, sans que cette mécanique ne soit trop invasive. Les phases à cheval sont également suffisamment souples pour se permettre de passer au travers de quelques rochers sans subir une collision qui casserait le rythme. Bref, l’histoire est certes racontée avec moins de cinématiques, les missions sont abordées plus lentement, mais il en résulte un jeu d’infiltration beaucoup plus jouissif. On prend un réel plaisir à élaborer sa stratégie avant d’entrer dans une base ennemie, aidé par l’impressionnante profondeur du champ de vision. Même l’heure est paramétrable, puisqu’on peut choisir d’être largué sur le terrain à 6h, 18h ou “dès que possible”. L’heure n’étant pas imposée, de nombreux joueurs ne joueront quasiment que de nuit, horaire bien plus discret. Et cerise sur le gâteau : les éternels cartons sont toujours là. Les décors de l’Angola et de l’Afghanistan invitent à réfléchir en trois dimensions, à jouer avec la hauteur, alors que les anciens opus n’offraient généralement qu’une réflexion sur deux dimensions. Et il faudra vite maîtriser cette nouvelle mécanique car l’intelligence artificielle des gardes est plutôt bien huilée. Les rondes sont parfois longues et si vous êtes repéré, une troupe ennemie peut vite établir une stratégie de défense. Pendant que des soldats se postent intelligemment et attaquent, d’autres appellent des secours. Si vous ne désactivez pas cette option, vous aurez toutefois quelques secondes en bullet time pour éliminer les gardes qui vous ont repéré. Cependant, même si les joueurs expérimentés opteront pour l’infiltration discrète, il est parfois possible voire obligatoire de sortir l’artillerie lourde.Un jeu d’infiltration beaucoup plus jouissif.
A Hideo Kojima game
Bref, le monde ouvert de The Phantom Pain ouvre le champ des possibilités, bien plus que dans Ground Zeroes, pour Big Boss mais aussi pour ses ennemis. Les pièges sont nombreux et il faut être vigilant avec les gardes, véhicules roulants ou volants, mines, et même avec les animaux sauvages ! Metal Gear Solid V : The Phantom Pain réussit à surprendre les aficionados et devrait sans aucun doute plaire aux nouveaux venus dans la saga. Hideo Kojima a encore frappé.Images et jeu PS4 fournis par l’éditeur.
L'avis général
- Les zones ouvertes
- Le gameplay souple
- La liberté dans l'approche des missions
- La durée de vie et le contenu gigantesque
- Les graphismes
- Les cassettes audio renfermant des détails du scénario
- Des boss moins charismatiques