Comment la VF du film Mario a révolutionnée le cinéma d’animationCapsule Temporelle


COMMENT LA VF DU FILM MARIO A RÉVOLUTIONNÉE LE CINÉMA D’ANIMATION
La VF du film Mario a régalé le monde entier. Plus encore, elle représente une petite révolution dans le cinéma d’animation gangréné par le star-talent.
On s’en souvient : dès la divulgation du premier trailer du film Super Mario Bros lors d’un Nintendo Direct dédié, toute la planète s’est extasiée devant la qualité des voix françaises, allant même jusqu’à dire qu’elles surpassaient la version originale. En même temps : Pierre Tessier en Mario, Christophe Lemoine en Bowser, Donald Reignoux en Kamek, Benoît Du Pac en Luigi et Emmanuel Garijo pour la voix de Toad, ça se pose là et ça annonçait forcément du lourd. Et même si le doubleur français d’Eric Cartman a finalement laissé sa place à Jérémie Covillault pour incarner le Roi des Koopas, on est quand même resté sur un cast de qualité.
Comment en est on arrivé là ? D’autant que ce n’était pas gagné dans une industrie du cinéma d’animation qui a pris l’habitude de faire du star-talent. On parle ici d’une pratique qui consiste à engager des célébrités, stars hollywoodiennes, chanteurs, chanteuses et influenceurs au doublage des personnages, tout ça pour renforcer la campagne marketing autour d’un film et faire plus d’argent. Chris Pratt dans le rôle de Mario en est le parfait exemple.
Attention, cela ne veut pas dire que certains acteurs ne peuvent pas être des doubleurs brillants. On pense notamment à Jack Black qui a prêté sa voix à de nombreux personnages de films d’animation et incarné Bowser à la perfection. Il n’empêche que le doublage reste un métier à part entière et personne ne l’exerce mieux que des doubleurs professionnels. Et heureusement pour nous petits Français, les équipes de la VF l’ont bien compris.
UNE VF TOP TIER
Si la version française est si belle et a su séduire le monde entier, c’est notamment grâce à la vision de Valérie Siclay, la directrice de doublage du film. Dans une interview accordée à BFM TV en avril 2023, on apprend par Jérémie Covillault qu’elle a réussi à persuader Nintendo et Universal de ne pas embaucher de star-talent et de prendre uniquement des professionnels du doublage.
« Elle a vraiment insisté et on nous a fait confiance », dit-il. « On a été pris de court par cet engouement, mais dès la deuxième bande-annonce [en janvier], on a été très attentifs à essayer de garder les mêmes personnes », poursuit à son tour Valérie Siclay.
Elle explique ensuite que le doublage a eu lieu sous le contrôle des producteurs du film et qu’ils ont validé chaque prise de la VF :
« Tous les comédiens ont fait des essais validés par Universal France, Universal Etats-Unis, Illumination France, Illumination Etats-Unis et Nintendo. Sur chaque étape, il y a eu cinq niveaux de validation. » Pour s’assurer d’un doublage de qualité, elle ajoute : « J’ai cherché, tout en prenant en compte la VO, des voix et des comédiens qui amèneraient quelque chose de particulier à l’univers de Mario ».
Mais cette réussite est aussi à mettre au profit des fans français eux-mêmes, qui un peu à la manière de la Pixel War, ont su faire suffisamment de bruit pour être remarquée par Universal, Illumination et Nintendo, comme le souligne le doubleur de Luigi :
Les fans de la VF se sont empressés d’aller sur le net et de créer le buzz en disant qu’ils n’iraient jamais voir le film s’ils faisaient appel à du star-talent. Je pense que ça leur a mis une certaine pression. Ils s’étaient déjà pris un scud des fans avec Sonic et ont ont eu peur d’un nouveau bad buzz. Universal, Illumination et Nintendo ont été un peu embringués malgré eux et un peu dépassés par le buzz. On a été tellement, tellement heureux d’aller au bout.
UN AVENIR RADIEUX POUR LE DOUBLAGE D’ANIMATION ?
Reste maintenant à savoir si le cas Mario restera une success story isolée ou s’il fera bouger les lignes à long terme dans le cinéma d’animation. « J’espère qu’ils vont se dire qu’on fait un travail de qualité, et qu’on peut nous faire confiance. Si ça fait bouger les choses, tant mieux », souhaite Pierre Tessier. De son côté, Jérémie Covillault reste prudent et nuance : « Je ne suis pas sûr que ce soit révolutionnaire, mais ça ouvre peut-être un petit peu les yeux. Ce serait beau que les décideurs réalisent qu’on fait du très bon travail, et parfois même du meilleur travail que le ‘star-talent ».
A son tour, Valérie Siclay préfère elle aussi prendre la chose avec les pincettes d’usage : « Qui sait qui sera décideur dans deux ou quatre ans chez Universal, Illumination, Nintendo, quand la suite sortira ? On doit évoluer avec des façons de travailler qui changent ». Certes, on ne sait pas de quoi demain sera fait, mais avec le succès du film Super Mario et sa suite qui s’annonce dans la même veine, nos doubleurs made in France ont encore de beaux jours devant eux.