Les échecs #02 – Wii U : l’échec tranquilleCapsule Temporelle
Tout le monde s’accorde à dire que la Wii U est un échec. Avec seulement 12,8 millions de machines vendues, la console n’a fait que le tiers des résultats de la Nintendo 64 et la moitié de ceux de la GameCube. Dans le classement total des consoles largement diffusées, la Wii U n’arrive qu’à la 21ème position, soit derrière la Vita mais devant le trio gagnant de Sega le fameux Game Gear-Saturn-Dreamcast qui n’a absolument pas endommagé le constructeur. Si son retard technologique vis-à-vis des concurrentes ou le problème de communication lors de son lancement font partie des facteurs évidents de son échec, la 3DS est la preuve même que l’on peut s’en sortir malgré cela à condition de sortir des jeux. Ainsi, le principal responsable est logiquement Nintendo qui semble ne jamais avoir fait d’efforts.
Wii U : 2012-2013
Outre les jeux de lancement ou annoncés avant la sortie, la majorité des titres Wii U ont été dévoilés lors du même Nintendo Direct le 23 janvier 2013. Lors de cette présentation, on apprend ainsi, sans plus d’informations que leur mise en chantier, l’existence de Wii Party U, Super Mario 3D World, Mario Kart 8, Yoshi’s Woolly World, Tokyo Mirage Sessions #FE, Xenoblade Chronicles X ainsi qu’un nouveau Zelda. On peut y ajouter les autres projets dévoilés la même année (Donkey Kong Country: Tropical Freeze, Pokkén Tournament et Hyrule Warriors), mais aussi les jeux déjà en développement à cette époque (Splatoon et Star Fox Zero). Il y a l’ensemble des jeux Wii U à l’exception de Super Mario Maker (qui était un outil de travail interne à la base) et des désastres que sont Mario Tennis : Ultra Smash, Kirby et le Pinceau Arc-en-ciel, Animal Crossing : amiibo Festival. Alors que sa nouvelle console de salon n’avait qu’un an, Nintendo se contentait déjà de terminer les projets en cours pour voir s’ils parvenaient à inverser la tendance.
Mario, Mario et toujours Mario
Si Nintendo a depuis des années son image de recycleur de licences, le catalogue Wii U semble d’autant plus en être la caricature. Ainsi sur les 10 jeux les plus vendus sur cette console, 4 possèdent « Mario » dans leur titre, sans oublier l’extension de l’un d’entre eux New Super Luigi U ainsi que Nintendo Land et Smash Bros qui ne sont pas dénués de plombiers non plus. D’ailleurs, si on retire le remake de Wind Waker de la 10ème position, c’est Mario Party 10 qui le remplace, ne laissant en dehors du Royaume Champignon que Wii Party U et Splatoon qui, pour l’anecdote, a été pensé pendant un temps comme un jeu Mario. En dehors de ça, aucun Pokémon, Metroid, F-Zero, Fire Emblem ou Animal Crossing digne de ce nom, pour ne citer que les séries qui n’ont pas eu d’épisode principal sur la console, la qualité des jeux Kirby, Star Fox et Wario restant à débattre. Si des jeux tels que Pikmin 3, Splatoon, Yoshi’s Woolly World et Xenoblade Chronicles X ont été de belles surprises, il est regrettable de constater qu’à défaut de créer de nouvelles licences, l’éditeur n’a même pas exploité celles qui étaient déjà installées, préférant ainsi une brouette de jeux Mario avec quelques remakes de Zelda.
Entre deux
Un jeu que l’on peut qualifier d’envergure AAA prend environ trois ans à être produit. Il peut donc sembler normal que Nintendo n’ait que très moyennement envie de prendre des risques sur le long terme. C’est aussi probablement pour cela que devant le manque de créations, le constructeur a tenu à rassurer les investisseurs avec l’arrivée d’une nouvelle console, ce qui a provoqué une phase inédite dans l’histoire du jeu vidéo. Deux problèmes sont apparus en annonçant aussi tôt la NX le 17 mars 2015, soit deux ans et quatre mois après la commercialisation de la Wii U. D’un côté, la machine n’était pas prête pour que le développement de ses titres débute. De l’autre, s’engager pour trois ans de travail sur une machine déjà condamnée n’était pas la situation idéale non plus. Ainsi, lors de l’E3 2015, Kensuke Tanabe, producteur notamment des Metroid Prime, expliquait précisément cette problématique à la presse, avouant par conséquent l’abandon total de la Wii U près de deux ans avant la sortie du successeur.
Le soldat Monolith
Sur les jeux cités précédemment, la part importante de productions confiées à des partenaires a également de quoi faire peur. Smash Bros et Pokkén Tournament ont été développés par Bandai Namco, Hyrule Warriors par Koei Tecmo, Tokyo Mirage Sessions #FE par Atlus, Xenoblade Chronicles X par Monolith Soft, Tropical Freeze par Retro Studio, Star Fox Zero par PlatinumGames… Nintendo ne paraît pas en mesure d’assumer la création de jeux HD. Sur l’ensemble du catalogue Wii U, seuls New Super Mario Bros U, Nintendo Land, Super Mario Maker et Wind Waker HD ont été réalisés sans aide extérieure. On retrouve par exemple Bandai Namco dans les crédits de Mario Kart 8. C’est ainsi Monolith qui semble le plus soutenir les créations Nintendo avec à son actif des participations dans Pikmin 3 et Splatoon. Le studio a d’ailleurs ouvert des bureaux à Kyoto en plus de ceux de Tokyo. Cette branche emploie une trentaine de personnes dédiées au soutien de Nintendo dans ses projets internes, dont un certain Zelda Wii U-NX ferait partie selon des rumeurs régulières.
Nintendo a clairement fait l’impasse sur sa Wii U que ce soit à cause de problèmes techniques ou parce que l’entreprise n’a pas voulu accepter la situation que les consommateurs lui ont attribué sur le marché des consoles de salon. Avec, au choix, des mauvaises décisions stratégiques ou un réel dédain pour les joueurs, le constructeur tient à tourner au plus vite la page au lieu d’effectuer une réelle remise en question. Si la NX arrive en mars 2017, la société ne compte pas la présenter avant au moins juillet, préférant consacrer son E3 au nouveau Zelda (et esquivant probablement au passage la case Conférence/Présentation). En 2013, le regretté Satoru Iwata reconnaissait que la communication autour de la Wii U n’avait pas été assez claire, un schéma qui se reproduit malheureusement avec le prochain produit de Nintendo dont le mystère autour de son concept n’a d’égal que les promesses de révolution.