KerriganCentre de l'intrigue de la série Starcraft
KERRIGANtrophé du grand méchant
Sarah Kerrigan est l’un des personnages centraux de l’univers de Starcraft. Elle est devenue une icône du jeu vidéo notamment grâce à sa personnalité très riche et son histoire mouvementée, appartenant successivement à plusieurs factions.
LES TOURMENTS D’UNE ÂME SENSIBLE ET ESSEULÉE
Sarah Louise Kerrigan est née sur la planète Tarkossia en tant que Terrane (les Terrans sont une civilisation du secteur Koprulu construite par d’anciens délinquants bannis de la Terre). Durant son enfance, elle manifeste déjà des pouvoirs psychiques supérieurs à tous les autres Terrans présentant ce genre de facultés, mais s’en rend hélas compte lorsqu’elle tue sa mère accidentellement et endommage gravement le cerveau de son père. Ces évènements attireront sur elle l’attention des agents confédérés, qui la forceront à intégrer le programme « Ghost ». Elle deviendra alors un fantôme, l’un de ces assassins hors-pair que la confédération garde sous contrôle par une limitations de leurs capacités psi (qui sont telles que la Confédération a dû réajuster ses échelles de mesure pour pouvoir les mesurer).
Sans famille, traitée durement par des instructeurs cherchant à la briser psychologiquement, la jeune Sarah développe une personnalité introvertie, et une méfiance envers le monde. Sauvée par Arcturus Mengsk, leader d’un mouvement révolutionnaire, elle sera à nouveau déçue en s’apercevant qu’il ne s’intéresse qu’à ses capacités d’assassin. Mengsk la trahira sur Tarsonis, en l’abandonnant sciemment au milieu d’une nuée de Zergs. Cependant, ses hautes capacités psychiques attirent l’attention de l’Overmind, l’entité qui mène alors l’essaim des Zerg, et Sarah Kerrigan sera alors transformée pour devenir une nouvelle forme de vie : partiellement humaine, partiellement Zerg, dotée d’un libre arbitre humain, mais d’une capacité à comprendre les Zergs et à communiquer avec leur conscience collective, elle deviendra l’une des entités les plus puissantes de l’univers connu.
Réduite à ses capacités d’assassin, manipulée telle un pion sur un échiquier par toutes les factions qui ont conscience de son existence, Kerrigan trace peu à peu son propre chemin : d’abord mue par la vengeance, puis par un espoir de rédemption, puis, enfin, par l’envie de protéger toute vie, sans distinction de race, elle nourrit une profonde colère envers le monde, mais également envers elle-même. Trahisons et traumatismes jalonnent la vie de Kerrigan, et elle semble avoir perdu la capacité de faire confiance en qui que ce soit, excepté Jim Raynor, avec lequel elle a vécu une romance mouvementée : redevenue humaine grâce à l’intervention de son amour perdu, elle décidera de redevenir Zerg, pour lui sauver la vie. Leur relation amoureuse sera parfois source de souffrances, puisqu’elle le contactera parfois dans ses rêves grâce à leur lien télépathique, pour lui donner un plaisir qu’il vivra avec culpabilité… Raynor exploitera parfois ce lien télépathique pour donner des informations précieuses à ses alliés concernant les plans de son ancienne amante.
Incomprise, incapable d’expliquer à qui que ce soit la complexité de ce qu’elle ressent, Kerrigan est solitaire, malgré son statut de déesse révérée par les nuées de milliards de Zergs. Même si elle considère que tous les protagonistes de la grande guerre ont les mains couvertes de sang, elle reste néanmoins dégoûtée avant tout par elle-même, honteuse des millions de vies Terranes, Zergs et Protoss auxquelles elle a mis fin… C’est d’ailleurs à ce titre qu’elle décidera de se sacrifier à la fin de l’histoire de Legacy of the Void, en devenant Xel Naga, abandonnant complètement le monde des humains pour offrir un futur aux trois espèces vivant dans la galaxie.
UNE AMBIVALENCE CHARISMATIQUE
Si Kerrigan est si appréciée des fans (au point d’avoir été élue Meilleur Méchant de l’Histoire du Jeu Vidéo dans un sondage Gamespot de 2010), c’est avant tout parce qu’elle n’est pas vraiment un antagoniste clairement défini comme tel, et cela va bien au delà du fait du simple frisson d’incarner le « méchant » dans les campagnes des jeux Starcraft… En effet, l’univers de Starcraft (jeux, mais aussi romans et mangas) montre que Kerrigan est une âme damnée qui a presque abandonné tout espoir de rédemption, tant elle a honte de ce qu’elle a été forcée de faire, tant comme Terrane que comme Zerg…
Bien qu’elle soit l’un des êtres les plus puissants de la galaxie, elle manifeste souvent de la compassion et accepte de changer ses plans de bataille pour épargner des populations civiles, et fait grâce à certains ennemis lorsqu’ils ne peuvent plus lui nuire dans l’immédiat, quand bien même ce choix ne serait pas le plus sûr pour elle.
Forcée de commettre des sacrifices inexcusables d’un point de vue humain, Kerrigan doit affronter des ennemis potentiellement plus puissants qu’elle (Amon, et son mystérieux maître : la voix des ténèbres qui vit dans le vide). Elle se retrouve aussi parfois alliée à des individus auxquels elle a pris des êtres chers (Zeratul, par exemple, mais aussi Valerian Mengsk). Kerrigan est donc loin d’être ambivalente simplement parce qu’elle a plusieurs fois changé de camp : elle est ambivalente parce qu’impuissante face à la vertigineuse insolvabilité de sa situation, toujours perdante, quel que soit le choix qu’elle fait. Kerrigan est un personnage profondément complexe qui plait aux fans par ses actes de bonté clairement réfléchis et assumés, ainsi que son appartenance et son attachement à plusieurs races ennemies entre elles.
C’est une femme déchirée, tiraillée entre responsabilités, conflits, et engagements contradictoires…
INSPIRATIONS
Dans le premier épisode de Starcraft, Glynnis Talken-Campbell décrivait la voix de Kerrigan comme difficile à interpréter, car elle requiérait d’apprendre à « faire sortir sa guerrière intérieure », ce qui exprime bien le caractère combatif du personnage. Son nom a d’ailleurs été choisi en hommage à la patineuse Nancy Kerrigan, célèbre à l’époque pour son tempérament de compétitrice née.
Lors d’interviews en 2009 et 2011, Chris Metzen la décrit comme « la personne la plus solitaire de l’univers » et considère que son espoir de rédemption, et sa relation avec Jim Raynor sont aussi importants, dans l’intrigue de la série Starcraft, que les évènements cosmiques de grand envergure (chute de civilisations, guerres, anciennes races revenant à la vie). Metzen laisse aussi entendre que la relation Raynor-Kerrigan est inspirée de son expérience personnelle : un homme combattant ses propres démons, tout en essayant de sauver une femme d’elle-même. Le design original de Kerrigan était celui d’une femme athlétique, mais le modèle « in-game » était moins féminin, vu de loin, ce qui a amené à accentuer les formes du modèle, surtout dans sa version Zerg, dont les ailes augmentent l’envergure et limitent la clarté visuelle du personnage.
Monstre honteux et dégoûté de chaque fibre de son propre être, monstre amoureux, monstre aux mains déformées, ou aux mains supplémentaires (ses fameuses ailes), Kerrigan est une transposition, dans un univers de science-fiction quelque peu pessimiste, des codes de l’expressionnisme allemand au cinéma.
Malgré son rôle important dans l’histoire de Starcraft, Sarah Kerrigan n’a été créée qu’à mi-chemin de la production de la première campagne du jeu original. D’abord personnage secondaire, elle fut etoffée pour devenir cette icône emblématique du jeu vidéo, qui continuera de fasciner les fans par la profondeur abyssale de sa tristesse, et par l’aspect quasi-inaccessible de sa rédemption.