Préhistoire du Jeu Vidéo #08.1 – Les années 60, le MIT et Spacewar!Capsule Temporelle

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 Préhistoire du Jeu Vidéo #08 partie 1 : LES ANNÉES 60, LE MIT ET SPACEWAR! 


Huitième et dernier chapitre du livre « Préhistoire du Jeu Vidéo », écrit par Damien DJAOUTI aux éditions Pix’n Love, ce chapitre se penche sur les « hackeurs » du Massachusetts Institute of Technology (MIT) qui ont commencé à s’intéresser à l’informatique et aux jeux vidéo qui amènera au développement en 1961 de Spacewar!.

 

Spacewar ! photographié au Computer History Museum de Mountain View, Californie

 

D’UN CLUB DE HACKEURS-BIDOUILLEURS INFORMATIQUE AU DEVELOPPEMENT DE SPACEWAR!

Vers la fin des années 50 et début 60, quelques universités américaines se dotent d’ordinateurs, se diffuse ainsi de plus en plus l’utilisation de l’outil informatique, autant pour les professeurs-chercheurs que pour les étudiants. La créativité de certains esprits sont de notoriété et l’informatique est décortiqué de fond en comble dans les clubs et les réunions d’étudiants, souvent le soir après les cours. La diffusion de manuels de langage informatique tel que BASIC aide également cette étape de l’ère du bidouillage et de la débrouillardise de ce que l’histoire va appeler les premiers « hackeurs » informatique.

 

Photographie d’un TX-0, crédit photo IEEE History Center

Réplique d’un DEC PDP-1 au Computer History Museum de Californie

 

Damien Djaouti raconte que dans le cas du MIT, ce sont les étudiants du Tech Model Railroad Club (TMRC) qui ont récupéré un vieil IBM 407 qui était abandonné par le MIT et se sont fait la main dessus en tentant de comprendre, seuls, le fonctionnement de la machine et la programmation très technique des cartes perforées. Par la suite, le MIT a fait l’acquisition d’un TX-0 (premier ordinateur à utiliser des transistors à la place des lampes) qui est utilisé par des chercheurs en Intelligence Artificielle. Mais l’ordinateur est laissé libre entre 23h et 7h, rapidement ces créneaux horaires sont monopolisés par des étudiants, notamment ceux du TMRC dont certains sont étudiants dans le groupe de recherche. Sur cet ordinateur sera créé pour la première fois le programme Mouse in a Maze (1959) par Douglas Ross et John Ward, la souris qui cherche du fromage dans un labyrinthe. Ou encore un programme informatique conçu par Bill Daly pour jouer à Qubic, le jeu de morpion sur plateau tridimensionnel ; la difficulté pour la programmation de ce jeu de plateau (qui se vaux avec le NIMROD ou OXO) est la prise en compte de la troisième dimension qui complexifie amplement les calculs, tout comme l’intelligence artificielle qui doit toujours trouver le meilleur coup à faire dans un calcul toujours plus rapide.

 

Photo historique des membres du TMRC qui jouent aux échecs, probablement le programme « PDP-1 Chess » du MIT, un vrai faux jeu d’échecs en réseau… mais c’est une autre histoire

 

Etape suivante, le MIT se dote d’un PDP-1 à l’automne 1961, nouvel ordinateur, plus puissant et mieux équipé avec une mémoire plus vaste. La meilleure surprise réside surtout dans le fait qu’il n’existait encore aucun programme sur cet ordinateur. Les hackeurs ont champ libre. Les premières idées tournent autour du concept de faire des démonstrations de puissance de la nouvelle machine, comme c’est de coutume (on l’a vu depuis le premier article). Mais un trio de jeunes étudiants, Martin Graetz, Wayne Wiitanen et Steve Russell, éprit de science fiction, élabore plutôt une idée chère à leur cœur : un jeu de combat entre vaisseaux spatiaux, autrement nommé, avec l’enthousiasme qu’il faut, Spacewar!.

 

Image du menu de Spacewar! dans une version portée sur un PDP-10, restauré en 2015 par Oscar Vermeulen

 

Le développement du jeu repose en premier lieu sur un programme écrit par Steve Russell, où un point sur l’écran du PDP-1 se déplace en fonction d’un angle et d’une vitesse que le joueur donne. Il fait ensuite évoluer ce point en un ensemble représentant un vaisseau. Puis il y a deux vaisseaux et chacun des deux à des limites en carburant et en nombre de missiles disponibles. Puis le collectif des hackeurs fait évoluer le jeu en mettant en commun des idées : il est suggéré de mettre un fond étoilé pour donner une sensation de vitesse, le ciel étoilé réaliste et véridique est alors codé par Peter Samson ; Dan Edwards propose d’ajouter un système de gravité avec une étoile centrale qui attire les vaisseaux vers elle, il le code et l’intègre par la suite ; Martin Graetz code également une action de saut dans l’hyperespace, la fonctionnalité qui permet au vaisseau de disparaitre et de réapparaitre aléatoirement à un autre endroit (qui comporte le risque d’apparaitre dans l’étoile centrale). Le jeu devient ainsi un mixage entre action et stratégie. Une dernière étape de développement se porte sur les « manettes » de jeu, Alan Kotok et Bob Saunders du TMRC récupèrent un modèle de boitier de commande de trains et le bidouille pour correspondre aux commandes du jeu. En avril 1962, le jeu est prêt et le succès est incontestable parmi les étudiants du MIT (et quelques professeurs impliqués).

 

La fameuse manette de jeu dans une vue dessinée

 

Dan Edwards et Peter Samson jouent à Spacewar! en 1962, crédit photo : Computer History Museum.

 

La suite de l’article pour continuer l’histoire de Spacewar! est disponible ICI.