Réforme des licences de jeux : durcissement ici, assouplissement là ?
Les motifs de réforme, chez les États détenteurs de licence de jeux de casinos en ligne ou terrestres, divergent : soit, on a constaté un certain « laxisme », dans certains cas, soit, on veut favoriser un plus large investissement de la part de fonds étrangers.
On distinguera :
- Le modèle de la licence de Curaçao, imité par d’autres îles semi-autonomes, comme Saint- Martin et Aruba, qui avait besoin d’une reprise en main pour consolider sa réputation.
- Du modèle monopolistique de Macao, dans la sphère d’influence de la Chine, qui n’est pas encore sortie de la politique « Zéro Covid », mais cherche à diversifier les apports étrangers.
- Les deux types d’entités bénéficient d’une autonomie et d’un statut particulier à l’égard des lois générales en vigueur dans leur région d’appartenance.
LA LICENCE DE CURAÇAO, EN EXCÈS DE TOLÉRANCE ?
La libéralité a été le leitmotiv de la conduite de l’île de Curaçao. Elle repose sur une offre donnant-donnant, où les autorités de l’île apportent leur protection relative et leur homologation aux propriétaires d’établissements terrestres et en ligne. Ceux-ci, en retour, domicilient leurs avoirs dans les institutions bancaires et fiscales de l’île, avec tous les avantages que comporte la démarche.
Ce faisant, on a longtemps privilégié le confort de ces opérateurs à l’égard de la législation et de la fiscalité, sur le respect de normes « trop strictes », qui auraient pu les faire fuir. À ce jeu, une fois acquittée la taxe d’adhésion pour les deux premières années, fixée à 11.000 $, l’adhérent contribue à la prospérité générale de la population insulaire. Tout le monde y trouve son compte.
DES ABUS PAR MILLIERS
Les inconvénients de ce régime particulier ont amplifié et fini par se voir. L’État néerlandais a fait pression sur les autorités souveraines de Curaçao afin qu’elles mettent de l’ordre dans leurs affaires et sanctionnent les 12.000 opérateurs étrangers qui ont, de façon flagrante, abusé des libéralités de l’île pour enfreindre certaines règles. Les Pays-Bas, qui exercent les fonctions régaliennes des Affaires étrangères et de la Défense pour l’île, ne souhaitent pas que leur réputation soit entachée par de mauvaises pratiques outre-mer (les anciennes îles néerlandaises n’émargent pas de la juridiction européenne).
CURAÇAO, SAINT-MARTIN ET ARUBA, ÉTATS AUTONOMES DU ROYAUME DES PAYS-BAS
D’autres îles jouissent de la même autonomie et offrent également des licences de jeux, mais depuis moins longtemps que la très réputée homologation curacienne. Cependant, leur économie repose sur les mêmes atouts que sont le tourisme, dont l’accueil de croisières, les banques et les casinos.
L’expérience de refonte que mène Curaçao fera donc caisse de résonance pour ses petites sœurs. Elle se déroule sous la houlette du royaume, qui se présente comme consultant. Les deux autres îles vont s’en inspirer directement, de façon à éviter les « erreurs » et pièges -ou disons trop grandes largesses – commises par les tenants du modèle.
UN JUSTE DOSAGE POUR NE PAS « TUER LA POULE AUX OEUFS D’OR » DE CES ÎLES ?
La notion de « paradis fiscal » qu’ont adopté ces sites insulaires, loin du continent, tient autant aux exonérations qui s’y appliquent qu’à l’environnement « paradisiaque » que la nature y dispense. Même si d’utiles conseillers financiers viennent de métropole expliquer comment les affaires courantes se gèrent en Europe, les décisions seront prises en mettant les bénéfices pour l’économie de ces îles dans la balance.
Or, les uniques moyens de prospérer de l’île dépendent du plaisir que les voyageurs prennent à venir y dépenser de l’argent, ou à venir l’y placer pour bénéficier des avantages proposés.
MACAO : SORTIR D’UNE SITUATION DE MONOPOLE
La situation s’est avérée bien différente dans la réglementation ayant cours à Macao. Rappelons que le système judiciaire de cette cité est basée sur le droit civil portugais et non les lois chinoises. Si les autorités ont accepté de délivrer 6 licences à différents propriétaires, c’est dans le cadre d’une diversification des attributions : jusqu’à ces dernières années, Stanley Ho avait le monopole sur toute l’industrie du jeu de Macao, représentant 80 % de l’ensemble des recettes du gouvernement de Macao, cité balnéaire uniquement fondée sur les revenus des casinos, pour un secteur des jeux sept fois plus important que Las Vegas.
Cinq autres opérateurs sont entrés en lice en 2002, en obtenant une concession de 20 ans d’exploitation. Trois opérateurs bénéficient d’une concession initiale (Galaxy Entertainment Group Ltd, SJM Holdings Ltd et Wynn Macau), alors que trois autres passent par un système de sous-concessions (Sands China Ltd, MGM China Holdings Ltd et Melco Resorts and Entertainment Ltd ).
La réforme attribue également 15% de propriétés locales dans les casinos. Les casinos doivent 35% d’impôts au gouvernement, mais cette somme reste inchangée. La crise sanitaire et les restrictions qui ont cours ont lourdement pesé sur ce secteur.