Le MMO, c’est tout pas beau !Voxel Libre
Et si je vous disais que je n’aimais pas les MMO ? Vraiment, j’ai essayé, de WoW à Aion en passant par SWTOR, rien n’y fait, je reste définitivement hermétique à ce genre. C’est donc avec une totale partialité que je vais vous décrire ce qu’est un MMORPG Classique. N’y voyez pas d’attaque personnelle, simplement l’expression de l’incompréhension. Attardons-nous donc sur le MMORPG tel qu’il est conçu en grande majorité (Third Person View, Heroic Fantasy).
La désincarnation totale
Si l’on peut assurément reprocher une chose aux MMO, c’est bien l’absence totale d’incarnation du joueur dans le personnage joué. Ce n’est pas parce qu’on peut modifier la couleur du moindre pore de sa peau que l’on incarne davantage son personnage. Rien n’est plus agaçant que de pouvoir “pimper” son avatar à fond pour finalement le voir de dos tout au long de l’aventure, pendant que les autres joueurs se farciront votre physique ingrat.
Par ailleurs, je vous pose la question… dans quel type de jeu se sent-on le plus proche de son personnage du point de vue des contrôles ? Les jeux de combats, les Beat’em All… Rien de plus efficace pour incarner son avatar que de commander ses moindres faits et gestes dans une parfaite réactivité. Dans un MMO aux combats temps réel, cliquer sur des boutons pour que le personnage se mette à frapper l’adversaire à deux mètres de lui (avec succès) ne fonctionne pas aussi bien… On ne se sent jamais réellement maître de son personnage. On appuie sur un bouton, et il réalise une figure acrobatique élaborée provoquant une avalanche de scores à l’écran. Le détachement est d’autant plus grand lors d’un tour par tour. On y perd la capacité de déplacement.
Alors certes, la particularité du MMO réside dans la variété des actions, ce qui justifie les dizaines de petites icônes qui fourmillent aux quatre coins de l’écran. Nous passerons outre l’immersion fabuleuse qui en découle. Ceci était ironique. Ahah.
Réussir à entrer dans la peau de son personnage est également étroitement lié au scénario. Je reviendrai là dessus plus bas, mais il est certain que si le personnage ne vit pas d’aventures folles et trépidantes, le joueur ne risque pas d’en vivre. En effet, à part perdre des chiffres s’échappant au dessus de notre tête, notre avatar reste impassible face aux assauts d’un monstre titanesque. C’est vrai que propulser le joueur au sol ce serait risquer de frustrer cet enfant roi du 21ème siècle. On préfère le laisser faire ses guignoleries de cabrioles en boucle.
La surabondance d’items et d’outils voués à se démarquer des autres joueurs est également une question importante… Nul doute qu’il s’agit d’un élément essentiel du genre, toutefois, force est de constater que cela contribue largement à la surcharge des HUD et à l’impossibilité d’atteindre la moindre immersion.
L’élu
Un MMO, c’est aussi et surtout un schéma scénaristique désespérément simpliste. Vous êtes l’élu. Vous êtes Anakin, vous êtes Dieu, vous aimez qu’on vous triture la nouille. Parfois, les développeurs s’autorisent même une petite fantaisie : Vous êtes l’élu… en devenir… Pour l’instant vous n’êtes qu’un gros souillon. On pourra malgré tout reconnaître un développement de l’originalité ces dernières années avec des MMORPG beaucoup moins ringards dans leur narration. Il est maintenant coutume d’incarner un personnage assez lambda d’une faction présente sur tel ou tel jeu. On est d’accord, le genre ne se prête pas nécessairement au scénario et c’est loin d’être un facteur essentiel pour le jeu. Toutefois, force est de constater que les MMO disposant d’arcs narratifs nettement plus construits s’avèrent être plus prenants, je pense notamment à The Old Republic. Ce dernier avait même le bon goût d’intégrer son système de choix dans les dialogues hérité des anciennes prods de Bioware. Bref, on avait envie d’en savoir plus, et le scénario abordé de la sorte ne nuisait en rien à “l’expérience MMO” du titre. Pourquoi cela ne s’est-il pas démocratisé ? Pourquoi est-on constamment obligé de se farcir des pavés inintéressants de cinquante putains de lignes, et ce, uniquement pour nous demander de faire rentrer cinquante foutues poules dans ce satané enclos ! Sérieusement, vous les lisez vous ? Non ? Mais à quoi ça sert merde ?!
N’oublions pas le péché mignon des aficionados du genre, le farm (oui, l’élu ne déroge pas à la règle. Un bon gros bashing d’ennemis, rien de tel pour devenir le mage number one ! Tout ceci, c’est bien joli, quel plaisir de se upper au maximum ! Pourquoi ? Oh pour rien. Tout au plus être classé 3569ème de son serveur, chouette alors ! Je suis mauvaise langue, la plupart du temps, c’est ce qui ouvre la porte au précieux PvP et aux formidables arènes. Avant ça, soyez sûrs de faire des kilomètres pour obtenir le fameux ranking que vos amis ont déjà depuis des plombes… Bon, je suis peut-être encore un peu mauvaise langue, précisons. Imaginons la scène : synchronisation parfaite, l’équipe d’amis de choc… Allez ! On fait les quêtes ensemble ! Allons tous cueillir les soixante pétunias pour la potion de la Druidesse 589… Moi ça m’exalte, pas vous ?
Un monde de choix ? Mon cul.
Trop de liberté tue la liberté… C’est en substance ce que l’on pourra retenir du genre. Une trop grande liberté laissée au joueur, entraînant immanquablement une pauvreté des environnements. Une liberté inutile, se balader dans des immensités, c’est bien, qu’il y ait quelque chose à y faire serait nettement mieux. Typiquement, les villes sont souvent titanesques, chouette… dommage que l’on se retrouve sur des places immenses, contraint de la traverser cinquante fois pour faire l’intermédiaire entre deux PNJ. Tout ceci dans une grande sérénité, la quasi-absence d’autres joueurs vous procurant un bien bel avant-goût du néant.
Oui c’est vaste, oui c’est grand, oui on s’y perd, à tel point que la même texture est répétée sur des kilomètres. Au final, peu de liberté s’offre à nous, et dès lors qu’on s’éloigne des sentiers battus, le monde devient désespérément vide.
Le MMORPG, c’est également un formidable trompe l’ennui. Jamais le joueur ne sera réellement mis en difficulté. Une zone trop haut level sera scrupuleusement écartée pour éviter de perdre tout son stuff bêtement, tandis qu’une zone trop bas level se révélera beaucoup trop simple. Le joueur est donc cantonné à son couloir, sans surprise, sans challenge… Navrant dans un mode “ouvert”.
Le monde ou le joueur et son jeu ne sont réduits qu’à des statistiques
On notera la performance honorable de Guild Wars qui s’est toujours attaché à un modèle économique correct, ce n’est évidemment pas le seul dans ce cas là. On paie le jeu une fois, on l’a pour toujours et hors de question de payer davantage (encore que). Ce système d’achat et le free to play se démocratisent conjointement en ces temps où le joueur ne souhaite plus rien payer. Pour s’assurer une maîtrise totale de leur audimat, les studios financent des études d’addictologie afin de trouver le meilleur moyen de conserver les joueurs et surtout, qu’ils s’en sentent redevables… Gageons qu’ils passeront un peu plus de temps dans le shop afin d’assurer aux créateurs leur total dévouement. Certains jeux permettent de payer les items totalement avec l’argent récupéré en jouant. C’est honorable, mais les sommes sont souvent colossales et le joueur se mettra rapidement à passer à la caisse par commodité et lassitude.
Soin est souvent pris de déséquilibrer volontairement le jeu. L’exemple le plus courant étant de booster les caractéristiques des personnages d’une nouvelle extension. Tout le monde achètera, et ceux qui décident de ne pas céder ne feront pas le poids face à l’avalanche de joueurs, payant des fortunes pour un perso. Joueurs qu’il est encore moins compréhensible de trouver sur ce genre de jeu puisque leur comportement engendre le degré 0 d’enjeux dans le gameplay. On se demande ce qui provoque alors la dopamine chez ces joueurs. Peut-être une sorte de supériorité sociale sur des personnes virtuelles ? Si c’est le cas, bien piètre est l’estime de ce joueur envers lui-même, ne s’estimant pas assez bon pour vaincre par des moyens équitables. Bien sur, ce comportement est dû à la pratique de déséquilibrage provoquée par les développeurs en amont.
Enfin, la myriade d’informations fourmillant à l’écran rapprocherait plus le MMO du boursicotage que du véritable jeu vidéo, ici, tout est affaire de chiffre. On ne prend pas vraiment de plaisir à jouer, on s’en sent contraint pour optimiser à l’extrême son équipement et ses compétences. Pourquoi ? Nul ne le sait, le top classement étant monopolisé par des bots ou des gold-farmers.
Modalisons, modalisons…
Soyons néanmoins justes. Les directions artistiques des jeux du genre sont souvent extrêmement travaillées, et bien que l’aspect esthétique puisse diviser, force est de constater que des efforts sont faits pour rendre chaque univers véritablement unique.
Le MMORPG est également très prisé pour son côté fédérateur, permettant (entre autres) à des personnes peu enclines à se sociabiliser de faire partie d’une communauté et d’y trouver leur place.
Une des grandes particularités du genre est également sa capacité à créer des fan-fictions grâce à la foultitude d’animations présentes sur les jeux. Des plus complètes aux plus impertinentes. Les ressorts créatifs qui découlent de ces pratiques offrent aux joueurs un moyen d’expression intéressant. On pourra en revanche railler ces joueurs s’amusant à lancer des “emotes” à leurs amis du genre : “t’as vu comme je suis trop drôle ? T’as jamais vu cette anim en plus hein ? Allez on prend un screen et direct en photo facebook. LOL !”. (Oui, pardonnez-moi (ou pas j’en ai rien à faire), je n’ai pas pu m’empêcher un dernier sursaut de pédance médisante).
En résumé
Difficile de déterminer ce qui fait la différence entre le joueur de MMORPG et son détracteur. On s’étonnera surtout du fait que ce qui représente l’intérêt principal pour les uns, est la raison numéro un de ne pas aimer le jeu pour les autres.
Oui cet article peut paraître franchement véhément, il l’est, mais il faut davantage le prendre comme un cri de désespoir et d’incompréhension adressé à tous ces joueurs plutôt qu’un véritable déchaînement de haine. La question peut être résumée ainsi : Pourquoi ? Quel intérêt ?
Nous vous invitons donc à débattre de la question, dans la bonne foi et la sérénité qui caractérisent cet article (ahah).