• Développeur : Blue Manchu
  • Editeur : Humble Bundle
  • Site Web : PAL
  • Version testée : PC
  • Classification :
    Sigle âge 16 ans et plus
    Francaise : 29/05/2019
    Americaine : nc/nc/nc
    Japonaise : nc/nc/nc
  • Exclusivitée
  • PEGI :

Void Bastards

Rédigée par

Le comic comique de l'espace

N’importe qui peut se permettre d’annoncer son jeu comme étant « inspiré de Bioshock et System Shock 2 », mais quand on s’appelle Jonathan Chey et qu’on a littéralement fondé le studio responsable de leur développement, ces paroles semblent tout d’un coup plus légitimes et fondées.  Après leur tactical-RPG gratuit Card Hunter sorti en 2015, les australiens de Blue Manchu nous propulsent cette fois-ci au fin fond de l’espace avec Void Bastards, annoncé en novembre dernier lors de l’X018. SURPRISE, BUTTFACE !

Tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière

Ne vous êtes-vous jamais demandé ce qu’il adviendrait d’un vaisseau spatial transportant des milliers de prisonniers lyophilisés dans des sachets (pour faciliter le stockage en masse) en perdition au milieu d’une nébuleuse ? Normalement non, mais c’est pourtant à cette problématique que Void Bastards apporte une réponse : l’intelligence artificielle chargée du transport prend la décision de réhydrater un prisonnier pour qu’il pille les vaisseaux voisins à la recherche de matériaux et de ressources. Ajoutez à cela que la nébuleuse susmentionnée a transformé tous les visiteurs du secteur en mutants agressifs et vulgaires, et le risque de décès prématuré augmente considérablement. Aucun souci cependant, les réserves d’eau et de criminels en poudre sont presque illimitées et feront une parfaite armée de « volontaires », leurs sacrifices successifs permettront l’avancement de la mission, et c’est bien tout ce qui compte. Lâché dans l’espace, c’est maintenant à vous de décider de la manière d’aborder votre tâche.

Un bon coup de « Stapler » et c’en sera fini de lui

Voilà comment Void Bastards justifie intelligemment (comme Rogue Legacy avant lui) le principe du rogue-lite, où chaque mort n’est qu’un nouveau commencement (le game-over n’étant possible qu’en jouant en mode Ironman avec une seule vie). Si les développeurs admettent leur inspiration des séries phares d’Irrational Games, certains aspects rappellent plutôt Faster Than Light : la carte du monde est une vaste toile de vaisseaux échoués et reliés entre eux comme les neurones d’un système nerveux, mais il est ici impossible de faire demi-tour. Il va être vital de prévoir son chemin à l’avance afin d’éviter tout danger critique, et il est pour cela possible d’examiner chaque « nœud » avant de s’y déplacer. Une fois à proximité de l’orbite d’un vaisseau, il n’est pas forcément nécessaire de l’aborder, mais au bout du compte notre objectif est de les fouiller et chaque déplacement coûte de la nourriture et de l’essence. Quand faut y aller…

Faster Than Furious

Le plan du vaisseau est toujours disponible, mais la minimap ne l’est pas forcément

Un coup d’œil rapide sur les jauges disponibles : santé, oxygène, munitions ; selon la tournure que prennent les évènements il sera probablement plus prudent de quitter les lieux en urgence. L’urgence n’a pas encore de nom, mais ce premier astronef est plongé dans l’obscurité et chaque source de lumière est un danger potentiel. Le plus sûr consiste à rejoindre directement la cabine de pilotage et de télécharger les emplacements de ressources afin de pouvoir récupérer celle qui nous intéresse au plus vite. A première vue, les couloirs semblent déserts, mais de faibles échos de voix se répercutent sur les parois d’acier. Autant éviter toute rencontre fortuite, il vaut donc mieux suivre le plan du vaisseau pour atteindre notre destination en limitant la confrontation, tout en vidant le contenu de chaque placard sur la route. Les données récupérées dans la cabine indiquent qu’un objet primordial se trouve dans la salle d’où proviennent les voix.

Accroupi derrière un container renversé, une forme mobile se dessine petit à petit mais il ne s’agit que d’un Juve, un enfant mutant qui explose d’une simple balle bien placée en éparpillant ses tripes fluorescentes sur le sol. Menace éliminée. L’objet est enfin en notre possession mais pas le temps de se reposer car le manque de luminosité se fait trop oppressant. *STOMP STOMP STOMP*. Silence. « I KNOW YOU’RE THERE« . Un mastodonte de 2 mètres apparaît de nulle part et maintenant l’urgence a un nom : le Screw. Une fraction de seconde plus tard, le bouton de verrouillage de la porte est enclenché et une minuterie se met en marche avant la fermeture. 5 – 4 – le Screw atteint le seuil – 3 – 2 – il s’illumine et semble préparer une attaque – 1 – 0 – la porte se referme juste avant que des projectiles ne transpercent ma combinaison. Après une course effrénée en slalomant autour des monstres attirés par le vacarme, le retour au module de secours sonne la fin de ce premier round.

Bâtards pas très glorieux

Avoir un Screw comme allié, c’est quelque chose qui ne se refuse pas

Contrairement à ce que ce paragraphe laisse entendre, Void Bastards n’est pas du tout un survival-horror même si certaines situations pourront provoquer une tension irrécusable. La grande dose d’humour dont fait preuve le jeu désamorce le réel, notamment grâce aux répliques du narrateur (Kevan Brighting, déjà entendu dans The Stanley Parable), et à certaines cutscenes au style « comic book » plutôt sympathiques qui ponctueront votre progression. C’est en amassant divers bibelots que vous pourrez débloquer des bonus, armes et gadgets nécessaires à votre survie : les recettes de craft se dévoilent (lorsque vous êtes dans votre vaisseau) au fur et à mesure que votre quête avance. Avant chaque assaut, il n’est possible d’emporter avec soi qu’un seul équipement pour chacune des 3 catégories suivantes : armes, explosifs, gadgets. Chaque item a son utilité, mais certains demeurent plus avantageux que d’autres (comme le Zapper qui permet non seulement de stun les ennemis mais également de désactiver les mécanismes de défense).

Là où la magie de Void bastards opère, c’est dans son utilisation des interactions systémiques. Ici, pas de scripts, seul votre comportement aura une influence sur celui des ennemis : le bruit de vos pas, les pièges que vous mettrez en place, l’utilisation des modules présents… Il n’y a jamais qu’une seule solution pour un problème donné, et votre plaisir de jeu dépendra donc du choix de vos actions. Au fil du temps, on accumule des Merit (la monnaie disponible) qui pourront être utilisés pour déverrouiller certains coffres, ou pour activer la compétences de certains appareils : payer pour dévoiler l’emplacement des ennemis, ou pour bénéficier de l’aide d’une tourelle. Chaque navire est généré procéduralement et possède des caractéristiques spécifiques qui détermineront non seulement son apparence mais la catégorie de loot à son bord. En plus des 7 types de vaisseaux présents, viennent s’ajouter les modificateurs aléatoires, positifs (systèmes de sécurité désactivés, stocks de nourriture…) ou non (ennemis plus résistants, pannes d’électricité…), tandis que d’autres viendront directement altérer le statut de votre personnage, dans le but de rendre chaque partie différente.

La partie « gestion/aventure » s’allie parfaitement avec le côté « FPS » du titre

Space Pirate Traineur

Au bout de quelques heures, le plaisir de la découverte des éléments de gameplay laisse malgré tout place à une forme de routine. On hésite plus à faire le tour de chaque vaisseau en courant, décimant toute forme de résistance en combinant tout l’arsenal à notre disposition, et les combats initialement nerveux se ressembleront de plus en plus. Ce n’est pas forcément un problème en soi, mais l’élément le plus gênant vient de l’apparence réitérative des niveaux puisque chaque type de salle ne possède qu’une ou deux variantes. En mode Normal, la difficulté est rarement au rendez-vous et vous pourrez probablement finir votre première partie sans mourir, aussi sera-t-il préférable de commencer en Hard. Pour ce qui est de la durée de vie initiale, elle est relative au style de chaque joueur et tourne autour de 8h, mais les plus férus pourront toujours s’essayer aux modes alternatifs limitant le joueur à l’utilisation d’une seule catégorie d’équipement.

Le Zapper apporte quelques secondes de répit dans ce genre de situation

En dépit de la répétitivité des situations, l’exploration des épaves procure une jouissance indéniable grâce à la direction artistique et sonore, le second point fort du jeu. Le design de chaque arme ou ennemi est un régal incommensurable, avec leur style original pouvant être comparé aux comics des années 90. C’est le contraste flagrant entre les décors un peu ternes des environnements et les couleurs vives des modèles qui donnent à Void Bastards une atmosphère délectable, l’unique regret venant de la taille de l’arsenal et du bestiaire qu’on aurait voulus plus étoffés afin de profiter encore plus du talent des artistes 2D. A l’instar de XIII et de sa réalisation en cel-shading, les onomatopées ont un rôle esthétique et pratique puisqu’elles permettent d’informer le joueur de la nature des ennemis et de leur position (une idée réussie et plutôt bien exploitée). Du côté des effets sonores, doublages et musiques (composées par Ryan Roth), on trouve là aussi un travail de grande qualité qui nourrit l’ambiance singulière du jeu. Au final, Void Bastards reste une bonne surprise qui aurait pu être une véritable perle si son contenu avait été plus conséquent.

Visuellement, Void Bastards est franchement très agréable

 

Void bastards, c’est avant tout un jeu qui mélange avec brio des styles très différents. Si on prend plaisir à écumer chaque niveau en pillant des ressources, il manque quelque chose au gameplay qui justifierait de continuer une partie sur le long terme, et les affrontements ont trop rapidement tendance à se ressembler. Avec ses qualités artistiques évidentes, Void Bastards aurait mérité de bénéficier de plus de substance, mais il semblerait malgré tout que les développeurs n’en aient pas encore fini avec nous, et du contenu additionnel pourrait fortement donner au jeu une second souffle salvateur.

L'avis général

  • Un mélange des styles opéré avec succès
  • Les possibilités de gameplay multiples
  • Des armes et ennemis au design incroyable...
  • L'humour très présent malgré l'univers parfois glauque
  • Une ambiance visuelle et sonore réussie
  • La routine qui s'installe au bout de quelques heures
  • Le manque d'intérêt sur le long terme
  • ... mais on en voudrait plus
Blue Manchu signe ici un titre original et à la réalisation très propre, à mi-chemin entre rogue-lite FPS et stratégie. Il ne manquait pas grand chose pour obtenir un incontournable vidéoludique, mais la redondance fatidique qui s'amorce après quelques heures empêche Void Bastards d'être plus qu'un simple "bon jeu". C'est dommage, car sur la plupart des aspects, il est une preuve irréfutable du talent des développeurs.